26/07/2025
DANTAN LONTAN 📜 𝐀𝐩𝐫𝐞̀𝐬 𝐥𝐞 𝐜𝐲𝐜𝐥𝐨𝐧𝐞 𝐝𝐞 𝟏𝟗𝟎𝟒, 𝐒𝐚𝐢𝐧𝐭-𝐏𝐡𝐢𝐥𝐢𝐩𝐩𝐞 𝐜𝐫𝐢𝐚𝐢𝐭 𝐬𝐚 𝐬𝐨𝐢𝐟🌀
Il y a plus d'un siècle, un habitant de Saint-Philippe prenait la plume pour raconter les difficultés de sa commune après le passage d'un cyclone. Son témoignage, publié le 14 avril 1904 dans le Petit Journal de l'Île de la Réunion, nous plonge dans le quotidien difficile des Saint-Philippois de l'époque.
L'homme ne mâchait pas ses mots. Ironique et quelque peu désabusé, il dressait un tableau sans complaisance de la situation post-cyclonique. "Ce ne sont pas les nouvelles qui manquent en ce moment", écrivait-il. Et pour cause : les commissions se multipliaient comme les champignons après la pluie 🍄. Commission de secours, commission d'agriculture, commission d'hygiène... "Pour être complet, il ne nous manque plus que la commission des poissons salés", lançait-il avec un humour grinçant.
Mais au-delà de ces piques, le courrier révélait une réalité dramatique. La commission de secours, composée de quatre membres, avait bien fonctionné quelques jours début avril, distribuant "environ 50 balles de riz, deux boucauts de morue" - (NDLR : deux barils de bois blanc contenant du poisson séché ) - "une caisse de pétrole et deux cents et quelques francs" aux sinistrés. Des vivres de première nécessité qui témoignaient de l'ampleur des dégâts.
Le véritable drame, c'était l'eau 💧. Toute la population de Saint-Philippe se retrouvait privée de ce bien essentiel. La canalisation du Bras-Sec, cet ouvrage qui avait coûté la somme considérable de 100 000 francs à la colonie, "n'était plus qu'un souvenir". Emportée par les eaux tumultueuses du cyclone, elle laissait les habitants dans une situation critique.
L'auteur du courrier pointait du doigt une négligence qui l'exaspérait : la citerne située en face de l'église ⛪, d'une capacité de 150 mètres cubes, restait inutilisable. Pourtant, sa réparation aurait été simple et efficace. "Avec les pluies continuelles qu'on voit ici, la citerne étant pleine, je suis certain que les habitants de Saint-Philippe auraient provision d'eau pour trois mois au moins", calculait-il avec bon sens.
Mais cette citerne "restait béante depuis fort longtemps au point qu'elle commençait à se désagréger". Une situation d'autant plus frustrante que la solution semblait à portée de main. L'administration locale existait bien, mais son inaction laissait la population dans l'embarras.
Le ton du courrier alternait entre colère et résignation. L'auteur se retenait visiblement de critiquer plus vertement les autorités, craignant de "s'embourber dans cette maudite politique" qu'il considérait comme "une maladie grave et contagieuse". Une prudence compréhensible à une époque où la liberté d'expression avait ses limites.
Sa conclusion résonnait comme un cri du cœur 💔 : "Qu'on nous donne de l'eau, disent à l'unanimité les habitants, car la soif est une terrible maladie."
Ce témoignage nous rappelle combien les défis d'aujourd'hui - gestion de crise, reconstruction post-cyclonique, approvisionnement en eau - ne sont pas nouveaux à La Réunion. Il y a cent vingt ans déjà, les Saint-Philippois faisaient face aux mêmes difficultés avec la même détermination teintée d'ironie créole. Une leçon d'histoire qui résonne encore aujourd'hui.
✨ Inspiration : Le Petit Journal de l’île de La Réunion – édition du 14 avril 1904
📚 Source : gallica.bnf.fr / BnF
🖼️ Illustration : “Saint-Philippe en 1900” – reconstitution imaginaire réalisée par un générateur d’images