
24/08/2025
Les villes d’Avanos et Nuits-Saint-Georges sont jumelées
En Cappadoce, le vin n’est pas seulement une boisson : c’est une mémoire. Sur les sols volcaniques d’Avanos, les Hittites cultivaient déjà la vigne il y a plus de six millénaires. Leurs caves troglodytiques gardaient au frais la boisson des dieux, et leurs carafes aux formes ajourées servaient à un rituel immuable : le serviteur, carafe posée sur l’épaule, s’inclinait bras croisés pour remplir le verre de l’invité de son maître. Par prudence — car le poison n’était jamais loin des banquets — l’invité cognait son verre contre celui de son hôte, puis y versait quelques gouttes en le fixant dans les yeux. De là est née l’habitude de trinquer à la santé de l’autre, geste de confiance qui a traversé les siècles. On raconte aussi que l’on répandait du vin rouge sur le chemin d’un invité prestigieux pour l’honorer — peut-être l’ancêtre discret du tapis rouge protocolaire.
La Bourgogne, plus t**dive mais d’une rigueur monastique, fit du vin une liturgie. À Nuits-Saint-Georges, les bénédictins et cisterciens ont découpé chaque coteau comme une partition, inventant la grammaire du terroir et donnant au Pinot Noir ses lettres de noblesse. Là où la Cappadoce incarne l’origine, la Bourgogne a façonné l’apogée.
Et pourtant, au milieu de cette grande histoire, un détail nous arrache un sourire : l’invention du tonneau, nous la devons aux Gaulois. Pensé d’abord pour charrier la cervoise dans les forêts embrumées, il est devenu l’allié indispensable des plus grands crus. Ironie du destin : sans ce bricolage rustique, ni la Cappadoce millénaire, ni la Bourgogne monastique n’auraient pu offrir au monde leurs trésors liquides.
Aujourd’hui jumelées, Avanos et Nuits-Saint-Georges partagent cette fraternité : l’une gardienne des origines, l’autre maîtresse du raffinement, unies par la même ivresse de mémoire et de vin.